Droit pénal et procédure pénale
Avocat Article 53 et 73 du Code de procédure pénale L’état de flagrance.
Bien comprendre ce que signifie l’état de flagrance – Par Maître PUJOL Adrien
La définition de l’infraction flagrante est donnée par l’article 53 du Code de procédure pénale : il s’agit d’une définition aux contours stricts :
« Est qualifié crime ou délit flagrant, le crime ou le délit qui se commet actuellement, ou qui vient de se commettre. Il y a aussi crime ou délit flagrant lorsque, dans un temps très voisin de l’action, la personne est poursuivie par la clameur publique, ou est trouvée en possession d’objets, ou présente des traces ou indices, laissant penser qu’elle a participé au crime ou au délit ».
De plus, selon l’article 73 du Code de procédure pénale, en cas de crime ou de délit flagrant puni d’une peine d’emprisonnement, «toute personne a qualité pour en appréhender l’auteur… ».
On en déduit donc que l’arrestation peut être opérée non seulement par les officiers ou agents de police judiciaire, mais aussi par tout citoyen…
La personne appréhendée doit cependant être conduite immédiatement devant l’officier de police judiciaire le plus proche.
Le temps de l’action est donc important.
La loi tient d’abord compte d’un critère temporel (le crime ou le délit doit se commettre « actuellement, ou qui vient de se commettre » … ou « lorsque, dans un temps très voisin de l’action… »).
On le voit, le Code de procédure pénale en matière d’enquête de flagrance ne fournit pas d’indication précise quant au temps au-delà duquel il ne saurait y avoir flagrance…
Aujourd’hui et en dépit de débats jurisprudentiels, la Cour de cassation s’est petit à petit forgé une conception large du flagrant délit.
Ainsi, elle admet que le temps très voisin de l’action peut avoir une durée de 24 heures (Jurisprudence de la Chambre Criminelle – 26/02/1991 n° 90-87.360).
Pour un exemple concret : a été déclarée régulière la perquisition en flagrance laquelle a été diligentée dès la plainte de la victime qui, impressionnée par des risques de représailles, n’a dénoncé les faits à la police que 2 jours plus tard… à l’incitation d’un membre de sa famille…
En revanche, la flagrance ne se trouve pas caractérisée, lorsqu’un crime a été révélé 6 jours après sa commission (Jurisprudence de la Chambre Criminelle du 11/02/1998 n° 97-85.542).
En tout état de cause, nous estimons qu’au-delà d’un délai de 48 heures après l’infraction, l’état de flagrance est contestable et de doit pas entraîner des enquêtes sous ce régime…
Comment apprécier la situation de flagrance ?
Le critère d’apparence. La Cour de cassation a, à plusieurs reprises, affirmé que l’état de flagrance est établi, dès lors que les OPJ relèvent des indices apparents d’un comportement délictueux.
Par exemple : la présence d’une arme, visible dans la boîte à gants ouverte d’un véhicule accidenté, peut constituer un indice apparent d’un délit imputable au conducteur dudit véhicule – Jurisprudence de la Cambre Criminelle : 02/03/1993 n° 91-81.033.
En revanche, et à contrario : en l’absence de tels indices, la flagrance n’est pas établie. Et d’une manière globale, la tendance jurisprudentielle est d’exclure, du domaine de la flagrance les seuls soupçons des enquêteurs ou bien les seuls renseignements anonymes voire dénonciations – Jurisprudence de la Chambre Criminelle 11/07/2007 n° 07-83.42
En revanche, un renseignement anonyme s’il est appuyé ou corroboré par d’autres indices apparent et extérieurs laissant penser à un comportement délictueux ou criminel permettront aux enquêteurs de se saisir en flagrance – Jurisprudence Chambre Criminelle :12/03/1997, n° 96-83554.
Actualisation de la jurisprudence Chambre Criminelle : 11/12/2019, n° 19-82.457: le seul marquage du chien spécialisé devant la porte d'un appartement constitue l'indice objectif et apparent d'un comportement suspect, caractérisant la flagrance… |
Le régime applicable à l’enquête de flagrance : des pouvoirs étendus pour les enquêteurs
Le caractère coercitif (imposé) des investigations :
Lorsque l’infraction flagrante est un crime ou un délit punissable d’une peine d’emprisonnement les officiers de police judiciaire sont autorisés à procéder à un ensemble d’opérations.
En particulier, les perquisitions peuvent avoir lieu directement chez les personnes qui paraissent avoir participé à l’infraction ou détenir des pièces, informations ou objets relatifs aux faits incriminés.
Ainsi en flagrance, les officiers de police judiciaire pourront saisir tout ce qui peut servir à la manifestation de la vérité : objets ayant servi à commettre l’infraction ou destinés à la commettre, documents et données informatiques ainsi que tous autres objets en la possession des personnes paraissant avoir participé à l’infraction ou détenir des pièces, informations ou objets relatifs aux faits délictueux.
Les fonctionnaires de police judiciaire peuvent aussi procéder ou faire procéder à des prélèvements ou à des examens médicaux sur certaines catégories de personnes qui sont tenues de s’y soumettre sous sanction pénale.
En outre, ils peuvent interdire à toute personne de s’éloigner du lieu de l’infraction jusqu’à la clôture de leurs opérations et entendre toutes celles susceptibles de donner des renseignements sur les faits délictueux ou sur les objets et documents saisis.
Avant les éventuelles auditions libres ou en garde à vue (voir notre article sur l’audition libre), pensez à prendre conseil en amont avec un avocat dédié en droit et défense pénale.