Désordres de nature décennale après intervention de l’assurance dommages ouvrage

Assurance construction; quid des désordres après intervention de l'assurance dommages ouvrage ? 

Quelle est la nature de l'obligation de pré-financement de l'assureur dommages ouvrage, de résultat ou de moyen, et surtout qui doit prouver que les travaux de reprise sont en lien de causalité avec le désordre subi, l'assureur ou le maître d'ouvrage ?  

Dans cet Arrêt du 29 juin 2017 , il était question d'un premier désordre de nature décennale sur une copropriété, la résidence H...composée de bâtiments dont la réception a été prononcée le 31 octobre 1986. Le 30 août 1996, le syndicat des copropriétaires avait déclaré un sinistre affectant les garde-corps en chêne des balcons à l'assurance dommages ouvrage, qui avait notifié sa prise en charge du sinistre. 

assurance dommages ouvrage

Les travaux de reprise avaient été confiés à la société M..., assurée auprès d'une assurance de responsabilité décennale, sous le contrôle d'une société de coordination elle même assurée auprès d'une assurance de responsabilité décennale. Est également intervenue la société X..., qui a réalisé un métré des éléments détériorés.

Les travaux (de reprise) ont été réceptionnés le 2 octobre 2001. 

En 2007, le syndicat a adressé une nouvelle déclaration de sinistre à l'assureur dommages ouvrage, qui a opposé la prescription de l’action. Le syndicat a, après expertise, assigné l'assureur dommages ouvrage en indemnisation de ses préjudices. 

La cour d'appel de Caen a, pour rejeter cette demande, retenu que l’expert judiciaire a indiqué que le bois était atteint et complètement pourri à raison de la présence d’un champignon résupiné, le "perenniporia meridionalis", dont la première description remontait à 2004, qui avait été récolté en Belgique à partir de 1990 et dans l’Est de la France en 2002 et répertorié dans l’Ouest en 2005-2008.

Ce champignon faisait perdre toute résistance mécanique aux garde-corps et le sinistre trouvait sa source dans les bois d’origine et non dans ceux mis en oeuvre en 1999 et 2000. Ce n’était donc pas sans contradiction qu’il avait écrit et affirmé que la dégradation des garde-corps constatés en 2007, sept ans après les travaux de reprise, était la nécessaire continuité des désordres les ayant affectés en 1996 et donc le tribunal avait, selon elle, jugé à juste titre que n’était pas rapportée la preuve d’une insuffisance ou d’une inefficacité des travaux financés par l’assurance dommages-ouvrage.

La cour suprême casse et annule au motif qu'il incombe à l’assureur dommages ouvrage, tenu d’une obligation de pré-financer les travaux de nature à remédier efficacement aux désordres, de rapporter la preuve de l’absence de lien de causalité entre son intervention et le dommage, la cour d’appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé.  (l’article 1315, devenu 1353, du code civil)

Ici, il s'agissait de définir la charge de la preuve, à l'assurance dommages ouvrage ou au demandeur y compris en présence d'un rapport d'expertise, qui est considérée comme une preuve technique ? 

La cour de cassation troisième chambre civile (chambre de l'immobilier) a jugé que la charge de la preuve incombe à l'assureur dommages ouvrage chargé du préfinancement des travaux de nature à remédier aux désordres mais ce faisant, va plus loin en semblant indiquer que l'assurance dommages ouvrage aurait en charge une obligation de résultat concernant l'efficacité même desdits travaux de reprise.

Le simple constat du désordre sur les travaux de reprise semble donc un critère objectif suffisant pour renverser la charge de la preuve !