Devoir de conseil renforcé de l'entrepreneur en l'absence de maître d’œuvre

La société T. a été chargée par la société S. de la réalisation d'une plate-forme routière. Refusant de payer le solde du marché la société S. a été assignée par la société T. en paiement. La société S., invoquant une faute de conception et un manquement au devoir de conseil de l'entrepreneur, a formé une demande reconventionnelle en indemnisation.
 
Pour rejeter la demande de la société S., la Cour d'appel a retenu que, par temps de pluie, l'eau forme un miroir sur la plate-forme et s'évacue lentement de telle sorte qu'il reste des flaques variant entre cinq et vingt-cinq millimètres, mais que, malgré ces désordres dus à un tassement du terrain, la plate-forme, dont la composition est conforme au devis qui ne mentionne ni le nombre de véhicules ni leur nature, a été utilisée sans interruption pour le stationnement des poids lourds;que la société S., qui a fait le choix de l'économie d'un maître d’œuvre et n'a pas sollicité de travaux de sondage, ne peut reprocher à la société T. d'avoir omis de préconiser une étude géotechnique et d'avoir commis une erreur de conception ou manqué à son devoir de conseil.
 
La cour de cassation casse l'arrêt au visa de l'article 1147 du code civil aux motifs que l'absence de prise en compte de la nature du sol sur lequel a été construite une plate-forme, destinée au stationnement de véhicules poids-lourds, qui a subi un tassement généralisé entraînant la stagnation des eaux pluviales pendant plusieurs jours, constitue une faute de conception de l'ouvrage commise par l'entrepreneur intervenu en l'absence de maître d’œuvre.
 
Source : CIV 3ème 10 décembre 2015